18 mars 1871: en mémoire de la Commune de Paris
18 mars 2021C'était voilà 150 ans.
Dans la suite de la guerre franco-prussienne, du siège de Paris (réellement confiné, alors!), de cette "année terrible" dont parle Victor Hugo, une série de mouvements, d'agitations républicaines et révolutionnaires et d'insurrections éclatent dans plusieurs villes de France et même à Alger. Cela ne durera pas longtemps. Mais Paris à son tour se révolte. L'élément déclencheur est une protestation contre la décision du gouvernement installé à Versailles de faire enlever de Montmartre les canons de la Garde nationale... Paris veut continuer le combat et desserrer l'étau des armées prussiennes.
Et le mouvement de contestation populaire qui traverse tout le XIXème, porté par les clubs, les sociétés secrètes, la propagande par les chansons, peut laisser penser qu'enfin, une république démocratique et sociale est possible et qu'on peut édifier une société nouvelle. Droit des femmes, associations ouvrières de production, protection des locataires, séparation de l’Église et de l’État, restitution des biens déposés au Mont de Piété, etc. Le peuple d'artisans, d'ouvriers, d'artistes, d'étudiants, de militantes féministes déborde d'idées et de projets... et, en même temps, lutte contre la progression, sous les yeux des Prussiens, de l'armée régulière renforcée par ces paysans et marins recrutés dans la France de l'Ouest pour chasser les "partageux", les "rouges".
On connaît la suite: la semaine sanglante, les exécutions sommaires, les barricades, les incendies, les prisonniers et prisonnières parqués au camp de Satory, les tribunaux qui condamnent à tour de bras, les cadavres entassés, que les élégants et les élégantes viennent contempler et insulter, les bagnes, les déportations en Nouvelle Calédonie et pour les plus chanceux, la clandestinité et l'exil. Ces soixante-douze jours laisseront une trace sans commune mesure avec la faible durée de la Commune de Paris. Vous aurez pu en savoir plus par les livres, quelques émissions. Mais longtemps, ce moment sanglant de l'histoire nationale sera mis de côté dans une partie des mémoires et en tout cas, mal connu et bien peu enseigné. Encore aujourd'hui, alors qu'il s'agit d'un temps fort de notre passé, de la mémoire du mouvement ouvrier et des travailleurs, et des luttes qui ont marqué notre histoire.
Historien, moi, je ne le suis pas et je ne prétends rien apprendre à quiconque. Mais comme j'ai, il y a bien longtemps, travaillé sur la chanson sociale à la fin du XIXème siècle, après ces quelques images et les portraits de Louise Michel, de Jules Vallès et d'Eugène Pottier, je vous propose d'écouter quelques unes des chansons qui datent de ce moment de la Commune ou lui font écho.
Elle n'est pas morte
A coups de mitrailleuse
Et roulée avec son drapeau
Dans la terre argileuse
Et la tourbe des bourreaux gras
Se croyait la plus forte
Qu' la Commune n'est pas morte!
Comme on abat des pommes
Les Versaillais ont massacré
Pour le moins cent mille hommes
Et les cent mille assassinats
Voyez ce que ça rapporte
Qu' la Commune n'est pas morte!
Flourens, Duval, Millière,
Ferré, Rigault, Tony Moilin,
Gavé le cimetière.
On croyait lui couper les bras
Et lui vider l'aorte
Qu' la Commune n'est pas morte!
Comptant sur le silence
Achevé les blessés dans leur lit
Dans leur lit d'ambulance
Et le sang inondant les draps
Ruisselait sous la porte
Qu' la Commune n'est pas morte!
Marchands de calomnies
Ont répandu sur nos charniers
Leurs flots d'ignominie
Les Maxime Du Camp, les Dumas
Ont vomi leur eau-forte
Qu' la Commune n'est pas morte!
Qui plane sur leurs têtes
A l'enterrement de Vallès
Ils en étaient tout bêtes
Fait est qu'on était un fier tas
A lui servir d'escorte
Qu' la Commune n'est pas morte!
Qu' Marianne a la peau brune
Du chien dans l'ventre et qu'il est temps
D'crier "Vive la Commune!"
Et ça prouve à tous les Judas
Qu' si ça marche de la sorte
Qu'la Commune n'est pas morte!