Si on prend un peu de recul dans le temps et si on regarde ce qui se passe ailleurs, on voit bien que l'idée de revenir à une semaine de quatre jours de classe est aussi contestable en 2018 qu'elle l'était en 2008!

Et pourtant, malgré l'avis des plus grands spécialistes de l'histoire de l'éducation, de la plupart des pédagogues et chronobiologistes... le vent souffle en faveur de ce nouveau passage aux quatre jours hebdomadaires de classe à raison de 6 heures par jour 36 semaines par an.

C'est que l'affaire met en œuvre bien d'autres aspects que la stricte vie scolaire..

*On parle de "rythmes scolaires"... en termes d'organisation institutionnelle et familiale du temps des enfants sans toujours bien prendre en compte deux autres rythmes; celui de la vie même de l'enfant (ce qu'étudient les chronobiologistes) celui des apprentissages et pratiques scolaires (ce qu'étudient les pédagogues et les didacticiens)

Ne compte-t-on pas en heures les services des enseignants et des autres personnels? C'est sans doute commode en termes de gestion administrative, ça permet de répondre à certaines demandes corporatistes... mais est-ce la meilleure approche de la réalité des apprentissages et des activités des élèves? Et voilà l'heure qui devient l'unité du temps de l'enfant et de la vie à l'école, voire des volumes accordés aux différentes disciplines. Voilà les exigences et préférences des adultes (parents, maîtres, services communaux, entreprises...) qui pilotent l'organisation des temps de l'enfance..  Est-ce si judicieux que ça? Et si la question du temps de l'enfant et de l'élève était pensée en d'autres termes? Plus globaux, plus fluctuants, plus mobiles. Et si, dans cette comptabilité des jours et des heures on prenait la chose par le petit bout de la lorgnette?

Pourtant, ici et là, on relève des approches plus globales et peut-être plus judicieuses.

En France même, à partir de septembre 2010, une expérimentation dans 126 établissements et pour environ 7000 élèves a été menée sur une organisation "cours le matin et sport l'après-midi". On aurait aimé en connaître le bilan... et on peut se demander pourquoi l'après-midi avait été dévolu au seul "sport" et non à la diversité des pratiques d'éducation physique et de développement corporel et à la diversité des pratiques artistiques!

En Suéde, de puis les années 1990 la dérégulation bat son plein. Les établissements sont invités à s'inspirer d'une expérimentation sur des plannings flexibles par périodes de 5 ou 6 semaines avec réduction du temps voué aux apprentissages en classes, développement du temps individuel pour chaque élève selon son plan de travail propre et des temps de concertation autour d'un thème fédérateur abordé par des équipes d'enseignants. Dans d'autres domaines de l'activité humaine (la vie professionnelle, les initiatives associatives...) on passe du fractionnement tayloriste à une conception par projets: pourquoi ne pas en tirer parti aussi à l'école?

Ailleurs, c'est l'idée d'école à temps plein (associant activités scolaires, périscolaires, associatives...) qui fait son chemin sous des noms divers : Extended school, Ganztagschule, Tageschule, Full service schooling... Dans tous ces cas l'idée prévaut qu'il faut essayer de prendre en compte un temps plus long... sans le faire par des journées de classe plus longues.

Une conclusion émane d'expériences dans des pays différents: les dispositifs qui libèrent le plus de "temps libre" pour les élèves et les maîtres en resserrant au maximum la pause méridienne, en restreignant le nombre de jours de classe et en augmentant les temps de congés sont aussi les plus inégalitaires! Aux uns, cela offre des plages d'activités épanouissantes et variées avec les parents ou dans des structures collectives, aux autres il offre le temps de... traîner, de s'absorber dans les écrans et de tourner en rond tout en se berçant de l'illusion que c'est là les vrai temps libre, la vraie vie...

 

Qu'est-ce qui caractérise la situation actuelle en France?

*un manque de perspectives et de responsabilité:

La collectivité publique (L'Etat) ne s'est jamais saisi d'une mission d'intérêt général: la mise en place d'un service de l'accueil des enfants et préadolescents dans le tiers temps qui n'est ni celui de l'école, ni celui de la famille... Service que les communes géreraient de concert avec les associations et autres structures publiques dans le cadre défini par l’État et une perspective éducative, culturelle, sportive (et surtout pas scolaire)! Du coup, dans bien des familles l'école devient aussi... un outil de garde des enfants trop jeunes pour être laissés seuls... Et au lieu de penser les rythmes en termes d'apprentissages, on tend à les considérer sous l'angle de la garde des enfants quand les parents sont pris ailleurs... Cela se comprend... mais ça génère la confusion!

La mise en place d'un service d'accueil de l'enfance digne de ce nom. coûterait cher? Sans doute... Mais doit-on vraiment faire l'inventaire de ce qui coûte cher et ne répond pas à un  vrai besoin des enfants, des familles et du pays?

*un manque de clarté dans la répartition des temps et des rôles:

Il s'est bricolé, à Olivet et ailleurs, un assemblage si complexe qu'une chatte n'y retrouverait pas toujours ses petits... Un assemblage prenant la suite du temps scolaire ou tuilant la fin du temps scolaire et baptisé de toutes sortes de noms: périscolaire, NAP, APS etc... s'étend dans le temps entre la fin des classes et le retour des enfants chez eux, saupoudrant la vie des enfants d'activités d'intérêt et de valeur.... diverses... menées par des personnes parfois plus ou moins qualifiées pour ce faire...On aboutit ainsi aux longues journées vécues par les enfants, longues journées qui les fatiguent d'autant plus que s'y ajoutent d'autres activités choisies par les familles, quelques tâches scolaires etc... C'est cela qui fatigue les enfants... et non l'école stricto sensu!

*la conjonction d'"intérêts" variés et contradictoires...

    1 ceux des amateurs et admirateurs des grands week end... qui aiment et peuvent partir à la campagne, à la plage au ski pour deux jours voire un peu plus..

    2 ceux des communes qui peuvent vouloir souhaiter que le temps d'ouverture et de chauffage des locaux scolaires soit le plus court possible...

    3 ceux des personnels (enseignants...) qui voient d'un bon œil la concentration des temps de service... qui réduit un peu leur temps de transports professionnels et augmente les périodes de libre disposition de leur temps...

    4 l'opinion (possible) d'enfants qui aiment si peu l'école et ses apprentissages qu'ils voient d'abord que le nombre de jours où ils seront contraints à ce sort affreux sera diminué...

* A ces divers "intérêts" on peut objecter ceci:

    1   ces grands week end sont une source reconnue de fatigue préjudiciable à la reprise des activités scolaires le lundi matin. C'est net pour les enfants que leurs familles emmènent ici et là... c'est encore plus net pour les enfants des classes populaires et familles désargentées pour lesquelles ce sacro-saint week end est surtout un long temps de télé, d'écrans, de désœuvrement au pied des immeubles etc... Diminuer le nombre de jours d'école par semaine (et par an...) c'est aussi augmenter un facteur d'inégalité sociale...

    2    A force de vouloior réduire le nnombre de jours d'école...on pourrait souhaiter que l'école ne fonctionne que trois jours par semaine... et pourquoi pas deux? Imaginons le même type de raisonnement appliqué à l'ouverture des bureaux de poste, des guichets, des hôpitaux etc... Et dans le même temps d'aucuns se réjouissent de voir les grandes surfaces ouvrir le plus grand nombre de dimanches possible!

    3     on peut comprendre ce penchant des enseignants... d'autant plus que cela permet aux intéressè-e-s de résoudre assez bien la question de la garde des enfants en bas âge et de la surveillance des activités scolaires et extra scolaires des plus grands... en étant plus disponible pour s'occuper de ses propres enfants!

C'est aisément compréhensible... Est-ce pour autant admissible de la part de personnes qui sont recrutées et rémunérées pour prendre en charge la formation de tous les autres enfants?

De plus, on aura du mal à comprendre que les personnels puissent à la fois souhaiter la semaine de quatre jours... et se plaindre éventuellement de la longueur des journées de travail en présence des enfants et de la fatigue physique et nerveuse que cela occasionne! Hélas... bien des organisations syndicales se sont gardées de rappeler ces objections de bon sens à ceux de leurs adhérents dont le rêve secret est... d'aller en classe le moins souvent possible!

    4    Ben oui.... il arrive aux enfants d'avoir la vue un peu courte... A leurs parents aussi d'ailleurs... C'est bien pour ça que la décision en la matière ne devrait pas être le fruit de ce genre de consultation démocratique (ou de sondage) mais d'un choix gouvernemental délibéré et assumé.

On peut même imaginer qu'une école aux journées moins chargées mais plus nombreuses et dans le cadre d'une année scolaire plus longue permettrait des apprentissages moins denses mais plus durables, et, qui sait, de manière plus épanouissante...

On peut même se demander si la vraie solution ne serait pas d'aller vers une semaine de 5 jours de classe, modulés selon les âges en 8,9 ou 10 demi-journées.

Avec 25 heures de classe par semaine pour les plus grands (élémentaire) et selon les mêmes horaires d'entrée et de sortie pour un même enfant tout au long de la semaine.

Avec une prédominance de la matinée (9 h - 12h30) une pause méridienne réduite à 1 heure 30 et un temps scolaire d'après-midi de 14 h à 16 h 30 consacré aux activités de formation et d'épanouissement: Musique, Arts plastiques, activités physiques et sportives, recherches et travaux de groupe, sories éducatives...

Avec 6 semaines de "petits congés et la fin des zones qui ont été pensées en termes de tourisme de sports d'hiver (cela concerne.... 8% de la population!) et non de rythmes scolaires... Ceci n'empêcherait pas, au contraire, de prévoir des classes de montagne dans le cadre scolaire pour tous les enfants!

Avec 10 semaines de "grandes vacances" d'été... cela laisse les 36 semaines de temps d'activités scolaires prévues par la loi et dégage la possibilité de sessions de remise à niveau dans le cadre scolaire, tant pour les émèves qui en auraient besoin... que pour leurs enseignants.

Bref, on imagine que la question des rythmes scolaire smériterait un grand débat dans une perspective de refondation de l'école... et non un simple chois entre 4 ou 4.5 jours d'école par semaine.














 

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